Isabelle (Julie Delpy), biologiste franco-américaine, qui travaille dans un laboratoire à Berlin, est la mère divorcée d’une fillette de 7 ans dont elle doit partager la garde avec le père, James (Richard Armitage), qui manifeste par un souci de contrôle obsessionnel, son refus de cette séparation. Tension aggravée par le fait qu’Isabelle a un nouveau compagnon (Saleh Bakri) qui doit rester semi-clandestin pour éviter de nouveaux conflits.
Quand un matin, Isabelle découvre sa fille inconsciente, elle la fait transporter d’urgence à l’hôpital où elle est opérée d’une hémorragie cérébrale : pendant qu’elle cherche désespérément ce qui a pu provoquer cet accident, son mari arrive et l’accuse de négligence.
Alors que la fillette est dans le coma, la mère de la baby-sitter force sa fille à avouer que l’enfant s’est cognée au square. James accuse alors Isabelle d’être responsable du fait qu’elle a préféré reprendre son travail après la naissance de l’enfant au lieu de s’y consacrer exclusivement. La fillette ne sortira pas du coma et décèdera quelques jours plus tard. Les deux parents plongés dans le désespoir réagissent différemment : James tente de persuader Isabelle qu’ils doivent se soutenir, autrement dit qu’elle doit lui revenir, alors qu’Isabelle rejette toutes les aides : du père bien sûr, de sa mère, et même de son amant. L’enfant est maintenue en vie après sa mort cérébrale, pour un éventuel don d’organes, ce que la mère a beaucoup de mal à accepter. Quand elle donne finalement son accord, elle fait un prélèvement de cellules sur le corps de l’enfant et part à Moscou rencontrer un biologiste qui s’est spécialisé dans les grossesses tardives, pour le persuader de recréer un embryon à partir de ces cellules et de lui implanter (y-a-t-il vraiment qu’en Russie qu’on pratique cette sorte d’expérience ?).
D’abord hostile, le médecin finit par accepter en toute illégalité, sans qu’on sache s’il est touché par la détresse d’une collègue ou si c’est l’appât du gain (on ne comprend pas très bien d’ailleurs où Isabelle, qui se plaignait du coût trop élevé de l’école bilingue où sa fille était scolarisée, va trouver l’argent pour cette procédure longue et risquée). Après plusieurs tentatives qui se terminent par des fausses couches (Isabelle a 45 ans au moment de la mort de sa fille), on comprend que l’épouse du biologiste, mère de deux jeunes garçons, auprès de qui Isabelle s’est confiée pendant ses longs séjours à Moscou, a proposé de porter l’embryon.
Une ellipse nous transporte sept ans plus tard… Isabelle qui habite désormais Moscou avec son compagnon, accueille son ex-mari qui a eu entretemps un petit garçon, et l’emmène rencontrer sa fille Zoé, 7 ans, qui fréquente une école bilingue. C’est l’exacte réplique de la petite Zoé que nous avons côtoyée au début de l’histoire… sauf qu’elle ne connaît pas ce monsieur qui est son père biologique… lequel paraît accepter cette situation.
Cet épilogue, présenté comme un happy-end, résume à lui tout seul les problèmes que pose ce film.
Personne ne contestera que la mort de son enfant est ce qui peut arriver de pire dans la vie d’un parent. Et donc que la seule question à laquelle on est confronté est : comment faire le deuil de son enfant ? Or c’est exactement la question qu’élude le film en inventant cette histoire de clonage. L’une des réponses que se donnent souvent des parents en deuil est en effet de faire un autre enfant, et les récits abondent des traumatismes provoqués chez l’enfant en question par le non-dit du deuil qui a précédé sa naissance. Traumatisme lié au fait que les parents n’arrivent jamais pas à surmonter le fait que le second enfant n’est pas celui qu’ils ont perdu…
Le film nous propose un fantasme aussi désirable qu’il est irréalisable : le pouvoir de recréer à l’identique l’enfant qu’on a perdu. Parce que le clonage d’une brebis n’a rien à voir avec le clonage d’un être humain : parmi les arguments qu’Isabelle développe devant son collègue biologiste, elle affirme qu’on sait désormais que toutes les caractéristiques d’un être humain sont contenues dans ses cellules (ou quelque chose d’approchant). Or rien n’est plus faux : on sait au contraire aujourd’hui que la plasticité du cerveau est immense, et que les conditions dans lesquelles un enfant est élevé déterminent la plupart de ses traits de comportement et de ses caractéristiques intellectuelles. Donc l’idée qu’à partir du clonage des cellules, on va pouvoir reproduire le même enfant est une fake news absolue…
Enfin, on retrouve dans My Zoé la représentation d’un rapport fusionnel mère-enfant qu’on avait aussi dans Proxima, le film d’Alice Winocour, qui mettait également en scène une femme scientifique. À croire que les réalisatrices se sentent obligées de convaincre le public qu’une vocation professionnelle n’empêche pas d’être une "bonne mère"… C’est un peu triste qu’on en soit encore là !
Polémiquons.
1. My Zoé, 23 juillet 2021, 14:16, par PHILIPPE
C’est une fiction scientifique permettant de mettre en exergue le lien mère – fille (car l’enfant unique de l’ex-couple est une fille).
Cette dernière permet de créer une relation (garde partagée) très malsaine entre la mère et son ex. (par exemple la mise en valeur de la tension entre le rôle « traditionnel » de la mère et son activité professionnelle). Le côté féministe du film ? (sic)
Suite à un accident domestique (responsabilité indirecte de la mère ?), la mort inéluctable de la fille permet d’évoquer le don d’organes qui, d’après le père, fait vivre l’enfant à travers une autre personne. Ah bon !
La mère, insatisfaite de cette situation, veut cloner sa fille (l’ex. y est opposé). Il faut donc un « scientifique-fou-prenant des risques » pour réaliser la prouesse technique. Mais la mère étant trop âgée cela ne fonctionne pas. Alors, bien que opposée au projet, l’épouse du scientifique s’y colle (évoqué dans le film). Une GPA !
Une dizaine d’années plus tard, l’ex. rejoint la mère pour voir la clonée. Il est apaisé. Pourquoi ? Il est père …. d’un garçon ! ; la clonée ne le reconnaît pas comme père. Ouf !
Au 1°degré c’est un film d’automne pluvieux.
Au 2°degré « c’est quoi un enfant et à quoi cela sert-il ? », les progrès de la technique reproductive c’est bien ou mal ou dangereux ou …. pourquoi pas ? A priori Julie Delphy ne prend pas position.
En revanche une femme c’est « d’abord » une mère.