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Jean-Luc Godard


par Ginette Vincendeau / vendredi 16 septembre 2022

Les paradoxes de l'auteur emblématique de la Nouvelle Vague

Avec Jean-Luc Godard disparait la dernière grande figure de la Nouvelle Vague, le cinéaste français le plus connu au monde et un réalisateur controversé, aussi vénéré par certains qu’il a été détesté par d’autres. Godard, c’est une carrière extrêmement longue et riche – plus de 130 films si l’on compte les courts-métrages, films publicitaires, mini-séries films, ‘ciné-tracts’ etc. en plus des longs-métrages – de 1955 à 2018. C’est aussi une personnalité clivante à l’humour provocateur, avec ses fameux aphorismes (‘ce n’est pas une image juste, juste une image’ ; ‘le cinéma c’est la vérité vingt-quatre fois par seconde’), la voix un peu traînante avec son léger accent suisse et un ‘look’ cultivé aussi soigneusement que celui d’une star : les costumes sombres, la cigarette et surtout les lunettes noires : Agnès Varda en joue dans son petit ‘film dans le film’ humoristique Les Fiancés du pont Mac Donald, inséré dans Cléo de 5 à 7 (1962). Godard y poursuit sa ‘fiancée’, l’actrice Anna Karina (dans la vie son épouse à l’époque) ; il voit la vie en noir ou en rose selon qu’il porte ou enlève ses lunettes. À l’autre bout de leurs vie et carrière respectives, Varda tente de remettre Godard en scène dans Visages Villages (2016) ; accompagnée de l’artiste JR, coréalisateur du film, elle lui rend visite à Rolle en Suisse, mais malgré l’appel de Varda, au nom de leur ancienne amitié, Godard refuse d’apparaître. Cette absence, irritante sur le moment, semble aujourd’hui à la fois poignante et prémonitoire.

Jean-Luc Godard est né à Paris en 1930, issu d’une famille franco-suisse de la bourgeoisie protestante. Il passe son enfance sur les bords du lac Léman. Envoyé à Paris après la guerre, il tourne le dos à sa famille, abandonne ses études et fait les 400 coups, n’hésitant pas parfois à dérober livres et argent à ses proches pour subvenir à ses besoins. Il est vite attiré par le cinéma, visionne des films à la Cinémathèque et dans les ciné-clubs, rencontre François Truffaut, Eric Rohmer, Jacques Rivette et d’autres. Il devient l’un des "jeunes Turcs" de la nouvelle critique de cinéma, agrégés autour de leur mentor André Bazin. Il commence à écrire des critiques pour La Gazette du cinéma, Arts et surtout Les Cahiers du cinéma. Nourri de films des studios hollywoodiens et des œuvres de Jean Renoir, Roberto Rossellini et Ingmar Bergman, il participe à l’élaboration de la "politique des auteurs", qui clame haut et fort que le véritable "auteur" de cinéma est le réalisateur qui a une vision singulière, un "regard" (contrairement au simple "metteur-en-scène" qui ne fait qu’illustrer un scénario, visant là les grandes figures du cinéma français de la "Tradition de qualité" – René Clair, Claude Autant-Lara, etc.). La politique des auteurs aura une influence majeure sur la critique de cinéma et surtout va mener au cinéma de la Nouvelle Vague lorsque Godard, Truffaut et les autres passeront à la mise-en-scène. Si Varda les a précédés avec La Pointe courte en 1954, elle restera oubliée un certain temps et la Nouvelle Vague sera perçue comme l’œuvre des "jeunes Turcs", et comme le dit très justement Geneviève Sellier, dans son livre sur la Nouvelle Vague, un "cinéma au masculin singulier" [1].

Les débuts de Godard à la mise-en-scène sont hésitants. Après un passage médiocre à la Télévision suisse et plusieurs courts-métrages il a du mal à décoller alors que ses confrères ont pour la plupart sorti des films en 1959, certains avec éclat : Claude Chabrol avec Les Cousins et Le Beau Serge, Truffaut avec Les Quatre Cents Coups et Alain Resnais avec Hiroshima mon amour. Cependant, le premier long-métrage de Godard, À bout de souffle, s’il sort un an plus tard au printemps 1960, fait sensation et restera pour beaucoup le film emblématique de la Nouvelle Vague. À bout de souffle est considéré à juste titre comme un jalon majeur dans la modernité au cinéma. À la fuite effrénée du héros Michel Poiccard, petit truand néanmoins séduisant (irrésistible Jean-Paul Belmondo), fait écho le rythme rapide du montage extrêmement fragmenté, sur la musique jazzy de Martial Solal. Le charme "cool" de Belmondo et de sa partenaire Patricia interprétée par la star américaine Jean Seberg, le glamour du Paris des Champs-Élysées et les hommages cinéphiliques (à Humphrey Bogart entre autres) assurent le succès national et international du film, une performance au box-office qui restera inégalée dans toute la carrière du réalisateur. La modernité du couple au centre du film vaut qu’on s’y arrête quelques instants. Godard place délibérément le personnage de Belmondo du côté du mythe : héritier du héros tragique du film noir hollywoodien, il meurt à la fin de manière on ne peut moins réaliste. Cela ne l’empêche pas de se comporter en petit mufle bien français : il fait des remarques désobligeantes sur le physique des auto-stoppeuses, vole de l’argent à une copine et regarde sous les jupes d’une jeune femme dans la rue. Le personnage de Patricia prend acte de l’évolution des femmes : étudiante, elle travaille au New York Herald Tribune qu’elle vend dans la rue mais elle désire devenir journaliste. Cependant les personnages masculins s’attachent à brimer ou ridiculiser son ambition, que ce soit Michel, un journaliste ou l’écrivain ‘Parvulesco’ (le réalisateur Jean-Pierre Melville), qui la ramènent inexorablement à son physique, un mouvement avec lequel le réalisateur est complice par ses images – le visage de Seberg contre un tableau de Renoir. Cette ambivalence entre constat lucide et complicité, déconstruction et exploitation des mythes féminins, est une sorte de matrice qui va courir le long d’une partie importante de l’œuvre de Godard, surtout dans les années 1960. De même la filiation Godard-Michel Poiccard. Le cinéaste se met en scène ironiquement dans le film dans un petit caméo où il dénonce Michel à la police, mais symboliquement il se positionne en alter-ego de Belmondo avec son costume et ses lunettes noires, suggérant la similarité entre le desperado et l’artiste Nouvelle Vague qui lutte contre le système pour imposer sa vision.

Le succès d’À bout de souffle lance la carrière de Godard et il enchaîne tout le long des années 1960 sur une série de films qui pour beaucoup restent les plus importants et les plus beaux de sa filmographie. La période est souvent étiquetée "les années Karina", du nom de l’actrice d’origine danoise Anna Karina qui devient son épouse et sa "muse" et la figure féminine centrale de beaucoup de films de cette époque : Une femme est une femme (1961), Vivre sa vie (1962), Le Petit Soldat (1963), Bande à part (1964), Alphaville (1965) et Pierrot le fou (1965). D’autres films, avec d’autres actrices, complètent cette période faste : Le Mépris (1964), Une femme mariée (1964), Deux ou trois choses que je sais d’elle (1966) et Masculin féminin (1966). Certains empruntent à des genres reconnus, comme la comédie musicale ou le film d’anticipation, mais tous partagent l’esthétique Nouvelle Vague des tournages en décors naturels, d’un ton (en apparence) spontané et un certain romantisme désespéré (beaucoup finissent mal), faisant des films de cette période des œuvres à la fois intellectuelles et lyriques.

On y trouve trois grandes caractéristiques. D’abord, les films de Godard de cette époque proposent un extraordinaire panorama de la modernisation (et américanisation) de la France et son influence sur la vie urbaine, la culture populaire et les rapports humains – notamment Une femme mariée, Alphaville, Deux ou trois choses que je sais d’elle, Masculin féminin. Le deuxième aspect marquant des films de Godard des années 1960, qui s’inscrit en faux par rapport à une grande partie du cinéma français de l’époque, est une série impressionnante de personnages féminins qui s’inscrivent dans la lignée d’À bout de souffle. Il s’agit de portraits séduisants mais ambivalents d’héroïnes dans des films qui proposent une analyse pénétrante de l’oppression économique et culturelle des femmes sous le patriarcat (cf. les analyses des médias) et en même temps ont recours à un certain nombre de stéréotypes féminins (comme celui de la prostituée à la fois victime et consentante) d’autant plus insidieux qu’ils se logent sous la beauté, la délicatesse et le romantisme d’actrices comme Anna Karina ou Marina Vlady. Comme l’a montré Laura Mulvey à propos d’un film postérieur, Numéro deux (1974), Godard est à la fois critique et complice de la misogynie de son époque [2] . Cette formule trouve son apogée dans Vivre sa vie en 1962. Nana (Anna Karina) devient une prostituée pour gagner de l’argent. Godard mêle un pseudo documentaire sociologique (le film s’inspire d’une véritable enquête du juge Marcel Sacotte sur la prostitution en France) à un hommage d’un romantisme effréné à la beauté d’Anna Karina. Dans une célèbre scène vers la fin du film, un jeune amoureux transi (Peter Kassovitz, père du futur cinéaste Mathieu Kassovitz) lit un extrait de la nouvelle d’Edgar Alan Poe, Le Portrait ovale, métaphore de l’artiste masculin si obsédé par la beauté de son modèle féminin qu’il ne voit pas qu’elle se meurt. Dans le film, tandis que l’image magnifie le visage d’Anna Karina, la voix qu’on entend est celle de Godard qui termine par ces mots : "c’est notre histoire". Nana meurt à la fin du film. Si donc Godard, comme ses amis de la Nouvelle Vague, se conduit en artiste masculin obsessionnellement attaché à représenter la beauté de ses modèles féminins, contrairement à eux, il n’hésite pas à s’impliquer dans ce processus, conscient qu’il en fait partie. Cette ambivalence se retrouve, mêlée à ses réflexions cinéphiliques (troisième tendance importante de l’œuvre) dans Le Mépris, autre grand film emblématique dans lequel c’est non seulement la femme mais la star féminine – Brigitte Bardot – qui est sous le microscope. Le film marque aussi la préoccupation grandissante du réalisateur pour ce qu’il perçoit comme la mort du cinéma. Dans Le Mépris, le phénomène Bardot est disséqué à la fois avec lucidité (le rapport cinéma d’auteur/cinéma populaire, les contradictions de la célébrité, les paparazzi) et de manière punitive : Bardot, la star populaire dont le physique est exposé et la sexualité mise en avant, est associée à un producteur américain à la grossièreté comique, Prokosch (Jack Palance) et le couple est symboliquement tué à la fin dans un accident de voiture. Le prestigieux auteur du cinéma classique Fritz Lang et le scénariste/alter-ego de Godard, Paul Javal (Michel Piccoli), eux, survivent pour compléter le film-dans-le-film, Godard lui-même interprétant l’assistant de Fritz Lang. Grâce à la filiation Lang-Paul-Godard, celui-ci non seulement se place dans la lignée des grands cinéastes, mais il adopte la posture de l’artiste comme génie masculin en souffrance, en butte à la femme-obstacle. D’une part, le personnage de Camille (Bardot), par son mépris sape les ambitions artistiques de Paul obligé de se prostituer (gagner de l’argent en écrivant un scénario commercial) pour elle ; d’autre part par son alliance avec les forces du commerce représentées par Prokosh, Bardot la star entrave aussi symboliquement l’envol du cinéaste-auteur. Il y a un autre paradoxe dans le film : c’est à travers ses images les plus somptueuses, sur fond de Cinecittà et de la Villa Malaparte à Capri et la superbe musique de Georges Delerue que Godard annonce la mort du cinéma – ce qui ne l’empêchera pas de continuer à travailler pendant plus de 50 ans…

Le tournant de Mai 68 marque une étape importante pour Godard et son cinéma. Un an plus tôt, en 1967, La Chinoise, avec sa deuxième épouse Anne Wiazemsky (il se remarie en 1967, après avoir divorcé d’Anna Karina en 1964) et Week End (avec Mireille Darc) anticipent les bouleversements politiques et culturels de 1968 et inaugurent la phase la plus militante et la plus clivante du travail de Godard, parfois décrite comme "les années Mao". La décennie à venir témoigne de la radicalisation de Godard, ses positions anticapitalistes et anti-américaines (notamment sur le Vietnam) trouvant un écho dans la forme de plus en plus expérimentale de ses films. Il contraste sur ce point avec ses anciens collègues de la Nouvelle Vague qui se tournent vers une esthétique beaucoup plus classique. Tandis que Godard milite dans le milieu du cinéma (il soutient Henri Langlois et contribue à arrêter le festival de Cannes de 1968) mais aussi dans les rues, ses films s’éloignent des formats traditionnels ; il produit des ciné-tracts, contribue à des films collectifs et à des documentaires sur les luttes sociales, parfois produits par et pour la télévision.

Plus radicalement encore, Godard tente de détruire la notion d’auteur qu’il avait contribué à mettre en place, en fondant son identité avec celle de Jean-Pierre Gorin dans le groupe Dziga-Vertov, dont le film le plus connu est Vent d’Est (1970). Pour le réalisateur, c’est l’époque d’une baisse de notoriété et d’une marginalisation grandissante. Il est gravement blessé dans un accident de la route, se fâche avec un certain nombre d’amis dont Truffaut, et rompt avec Anne Wiazemsky. Celle-ci, devenue romancière, relate ses rapports avec Godard dans deux livres lucides et fascinants, Une année studieuse (2012) et Un an après (2015) – Michel Hazanavicius donne une version humoristique de ce dernier dans son film Le Redoutable (2017). Si Godard continue, selon une de ses célèbres formules, à "faire des films politiquement et non pas des films politiques", il se tourne vers un cinéma militant qui se veut plus accessible avec Tout va bien (1972) avec Jane Fonda et Yves Montand qui interprètent une journaliste et un réalisateur de films publicitaires kidnappés par des ouvriers en grève – film que le critique du Monde Jacques Mandelbaum voit comme "l’acte de décès du gauchisme en France" [3]. C’est aussi l’époque où il expérimente la vidéo et la télévision, notamment avec Numéro deux (1974) et la série France tour détour deux enfants (1977-78). Si les films des "années Mao" continuent d’avoir un impact majeur sur la critique dans les médias et les études universitaires sur le cinéma politique et le cinéma français en général, ils laissent moins de traces auprès du public.

Pourtant, le cinéaste prouve une fois de plus sa capacité à se réinventer. Dans les années 1980-1990, il effectue un "retour au cinéma" à travers une série de films où figurent souvent des grandes stars avec lesquelles il entretient des rapports notoirement conflictuels, voire hostiles – en particulier Sauve qui peut (la vie) (1980, avec Isabelle Huppert), Passion (1982, avec Hannah Schygulla), Prénom Carmen (1983), Je vous salue Marie (1985), Détective (1985, avec Johnny Halliday et Nathalie Baye), Nouvelle Vague (1990, avec Alain Delon) et Hélas pour moi (1993, avec Gérard Depardieu). Malgré la présence de ces stars, les films restent difficiles d’accès ; leur déconstruction des récits et du rapport entre son et image rebutent les spectateurs et déconcertent une partie de la critique, tandis que d’autres apprécient sa pratique réflexive du cinéma qui culmine avec l’autobiographique JLG/JLG, Portrait de décembre (1995). Mais cette période est aussi marquée par une œuvre qui à la longue se révélera peut-être plus importante, à savoir la monumentale série en huit épisodes, initialement prévue pour la télévision, Histoire(s) du cinéma (1988-1998). Si l’on peut ne pas apprécier la vision traditionnelle que Godard donne de l’histoire du cinéma (entre autres, les femmes cinéastes y sont réduites à la portion congrue et le cinéma envisagé reste celui d’un panthéon cinéphilique), on ne peut s’empêcher d’être impressionné par la richesse des images, extraits de films, documents en tous genres assemblés par Godard (qui d’ailleurs lui vaudront des problèmes de droits) pour ce qu’il conçoit comme "une échographie de l’histoire par le biais cinéma" [4]. Un autre facteur, moins immédiatement visible mais fondamental dans la vie et l’œuvre de Godard troisième manière est l’importance de sa collaboration personnelle et professionnelle avec la cinéaste Anne-Marie Miéville, avec qui il vit et travaille depuis le début des années 1970. Celle-ci collabore de diverses manières – scénario, montage, photographie, production – sur un certain nombre des œuvres de Godard, tout en réalisant ses propres films. Le couple s’installe en 1977 dans la ville de Rolle en Suisse.

Godard au XXIe siècle va continuer à s’intéresser à l’histoire et à la politique, par exemple les traces de l’Holocauste et ce qu’il voit comme les méfaits de l’américanisation en France dans Éloge de l’amour (2001), film qui alterne de somptueuses images issues de la pellicule en noir et blanc et des images numériques en couleurs. Il se tourne vers les guerres en Europe, notamment dans l’ex-Yougoslavie dans Notre musique (2004) et sur le pourtour de la Méditerranée dans Film Socialisme (2010). Si, donc, il s’est retiré sur les bords tranquilles du Lac Léman, il est toujours en prise avec les événements violents qui secouent le monde.

Celui qu’on a qualifié d’"enfant terrible" et de "superauteur", qui a été adulé, honni et même entarté, a aussi connu tous les honneurs : un César d’honneur en 1998, une exposition au Centre Pompidou en 2006, un Oscar d’honneur en 2011 (soulevant la controverse en raison de ses vues en faveur des Palestiniens, menant The New York Times à le nommer "le cinéaste européen le plus profondément déconcertant" [5]), une Palme d’Or spéciale pour son avant-dernier film, Le Livre d’image (2018). En écho à ce parcours long et fragmenté, chacun a son Godard. Le mien reste celui des années 1960. Avec À bout de souffle, il a, selon la formule de l’historien Georges Sadoul, "flanqué le feu à toutes les grammaires du cinéma" [6]. Il a aussi, dans ce film et ceux qui ont suivi pendant la décennie, radiographié la France des Trente Glorieuses. Surtout, dans À bout de souffle, Vivre sa vie, Une femme mariée, Masculin féminin et Le Mépris il a eu le mérite de mettre en scène plus explicitement que ses collègues de la Nouvelle Vague ses propres contradictions d’artiste masculin fragilisé et néanmoins dominant, d’analyste lucide sur l’oppression des femmes et pourtant imprégné d’une vision patriarcale, d’artiste fasciné par la culture populaire mais encore attaché à une certaine vision élitiste de l’art cinématographique.


Polémiquons.

  • ça fait du bien de lire ce très bon article qui rompt avec les hagiographies toutes prêtes auxquelles on s’attendait. Mais j’ai remarqué que, peut-être à cause de la mort concomitante de la reine Elizabeth II (Godard a mal calculé !), nous n’avons pas eu droit au déferlement de littérature auquel on aurait pu s’attendre. Il est sans doute un peu frappé de désuétude à moins qu’il n’entre dans son purgatoire : on verra bien s’il en ressortira.
    reste que bien davantage que Truffaut et ses confrères, il a rompu avec une forme dominante et a expérimenté des formes nouvelles. Je suis d’accord avec Ginette sur sa préférence pour la décennie 1960 et je partage ses réserves sur son regard sur les femmes. Quant à ses trop fameuses Histoire(s), devenues bible de l’enseignement universitaire, j’ai beaucoup de réserves. Le modèle a-chronologique inspiré sinon copié sur le Musée imaginaire de Malraux et la Mnémosynè de Warburg fait fi d’une des bases de la science historique : la chronologie et la chaîne à reconstituer des causalités. on en reviendra...

  • Très belle synthèse assez exhaustive sur une oeuvre foisonnante aux virages multiples. Un petit oubli de Made un USA pour la présence de Karina dans les films des années 1960. Le Livre d’images est vraiment son dernier film en 2018.

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[1Geneviève Sellier, La Nouvelle Vague, un cinéma au masculin singulier, Paris, CNRS éditions, 2005. Sur la Nouvelle Vague et Godard, voir aussi la biographie d’Antoine de Baecque, Godard, Paris, Grasset, 2010.

[2Voir le chapitre de Laura Mulvey dans Colin MacCabe, Godard, Images, Sounds, Politics, Londres, Palgrave Macmillan, 1980.

[3Jacques Mandelbaum, "Le réalisateur Jean-Luc Godard est mort", Le Monde, 13 décembre 2022.

[4Frédéric Bonnaud et Arnaud Viviant, Jean-Luc Godard en 1998 : ‘Le cinéma permet de penser les choses’ Les Inrockuptibles, nº 170, 1998.

[5Michael Cieply, ‘An Honorary Oscar Revives a Controversy’, The New York Times, 1er novembre 2010.

[6Georges Sadoul, ‘Le Quai des brumes 1960 : À bout de souffle de Jean-Luc Godard’, Les Lettres françaises, nº 818, 31 mars 1960.