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Nicolas Bedos / 2021

OSS117 : Alerte rouge en Afrique noire


Geneviève Sellier / mercredi 1er septembre 2021

Une comédie aux relents racistes


Le duo gagnant Michel Hazanavicius/ Jean Dujardin ne s’est pas reformé pour le 3e opus des aventures d’OSS117, l’agent secret parodique, aussi crétin qu’arrogant, adapté des polars de Jean Bruce. Selon Le Point, « le réalisateur n’a jamais eu le déclic inspirant pour un 3e volet, estimant que, depuis 2009, la situation en France s’est tellement tendue sur les questions de racisme et d’intolérance qu’un nouvel OSS doit impérativement trouver une autre manière de raconter les exploits de l’agent secret réac sans pour autant dénaturer son ADN comique. »

Que raconte ce troisième opus des aventures d’Hubert Bonisseur de la Bath, alias OSS117 ? Le chef des services secrets (Wladimir Yordanoff) l’envoie dans un pays d’Afrique « ami » avec mission de repérer et supprimer les opposants au dictateur que la France a mis en place. Mais on lui adjoint une nouvelle recrue des services, OSS 1001, (Pierre Niney), qui a une allure de minet hippy et va bientôt se révéler aussi compétent que son illustre prédécesseur est incapable. Les interventions d’OSS117 sabotent systématiquement les initiatives d’OSS1001, sous prétexte de l’empêcher de faire des bourdes. L’idée était bonne de créer un personnage masculin jeune et « moderne » pour souligner la ringardise de son aîné, mais ils finissent par faire alliance, bon gré malgré, et surtout aux 2/3 du film, Pierre Niney disparaît dans la gueule d’un crocodile, laissant le champ libre à son aîné.

Mais ce sont les personnages et le contexte africains qui posent vraiment problème : le dictateur (Habib Dembélé) au service duquel OSS117 est censé se mettre, est un personnage à la Ubu avec des effets lourdement burlesques, réminiscences de Bokassa (la présence de trois sosies pour se prémunir contre les attentats), mais sans aucune dimension politique ; sa jeune et belle épouse (Fatou N’Diaye) organise les mondanités du palais le jour, et se révèle leader de l’opposition la nuit, dans une version complètement archaïque (on la retrouve dans un village de cases où elle séquestre OSS117) ; quand OSS117 se retrouve en prison pour perturbation à l’ordre public, il y retrouve son jeune collègue qui tente d’infiltrer des opposants à la mine patibulaire qui tentent de le lyncher quand ils découvrent sa véritable identité… En fait, les opposants sont dirigés par un marchand d’armes blanc (Gilles Cohen) que les deux agents secrets réussiront à neutraliser… et OSS117 termine sa mission en dénonçant au dictateur sa jeune épouse rebelle… On comprend les réserves de Michel Hazavanicius !

Ce scénario concocté par Jean-François Halin en solitaire sera donc réalisé par Nicolas Bedos.

Contrairement aux deux films de Michel Hazavanicius, ce troisième film nous fait rire non pas tant de l’arrogance et de la bêtise d’Hubert Bonisseur de la Bath, que des personnages africains, qui, sous couvert de dénoncer les États fantoches créés par l’ancien colonisateur, sont un concentré de tous les préjugés racistes : face au dictateur complètement corrompu, les opposants sont des sauvages inquiétants, des hommes manipulés par un étranger ou des femmes qui ne peuvent résister au charme irrésistible d’OSS117. En effet la jeune épouse rebelle qui a kidnappé l’agent secret, finit par se jeter sur lui pour une partie de jambes en l’air… Les défaillances sexuelles qu’il avait éprouvées face à la gérante (blanche) de l’hôtel (Natacha Lindinger), disparaissent face à la femme noire, quand il évoque mentalement la grandeur de la France ! Quant à la gérante, elle lui préfèrera le minet hippie autrement performant ! Le film se termine sur OSS117 qui dénonce au dictateur son épouse rebelle… et revient à Paris, mission accomplie. Sans commentaires !

Avec OSS117 : Alerte rouge en Afrique noire, Nicolas Bedos ajoute le racisme à l’anti-féminisme qu’on a pu « apprécier » au moment de la cérémonie des Césars 2020. Ces commentaires faisaient suite à d’autres prises de position grossièrement masculinistes, dont témoignent aussi ses scénarios (Les Infidèles, 2012) et ses films précédents comme La Belle époque (2019). Tout cela est aussi cohérent qu’accablant.


générique


Polémiquons.

  • Difficile d’être autant déçu par un film.
    Scénario lourdingue, tentatives de gags souvent pénibles dans leur longueur, les idées intéressantes sont systématiquement sabotées, des pans entiers laissent perplexes (que vient faire le passage de l’informatique, pourquoi le crocodile emporte 1001,...).
    Restent en effet le racisme et la misogynie, pour lesquels on cherche, souvent sans le trouver, le second degré.

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