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Centre National de la Cinématographie

La place des femmes dans l’industrie cinématographique en 2019


>> Geneviève Sellier / vendredi 18 décembre 2020

Une progression très relative

Comme il en a l’obligation depuis 2014, le CNC publie un rapport annuel sur la place des femmes dans l’industrie cinématographique en France. Cette année, le rapport propose un bilan comparatif sur les dix dernières années. Malgré des annonces positives comme « progression des films réalisés par des femmes », « le documentaire, un genre qui tend vers la parité », « une présence accrue des nouvelles réalisatrices », « une part croissante de femmes dans la production cinéma », « féminisation des professions les plus masculines », l’analyse détaillée des évolutions met en évidence le caractère modeste ou aléatoire des changements :

  par exemple, si la part des films réalisés par des femmes est passée de 20% en 2010 à 26% en 2019, on constate qu’il ne s’agit pas du tout d’une progression linéaire qui pourrait se poursuivre : en 2013, elle est de 24,5% mais retombe à 22% en 2014, remonte à 27% en 2017 pour redescendre à 25% en 2018.

  Les premiers films réalisés par des femmes sont sensiblement plus nombreux (on passe de 27% à 40%), mais on sait que la difficulté pour une femme est de faire un second film…

D’après le collectif 50/50, la très récente mesure (2019) adoptée par le CNC accordant une bonification de 15% aux films dont les chef.fes de postes sont paritaires, a eu un effet de levier considérable : en 2020, 34% des films agréés ont bénéficié du bonus parité, contre 22% en 2019. Cela aura sans doute un effet boomerang sur le nombre de films réalisés par des femmes. Il faudra vérifier.

  Les écarts moyens entre les budgets des films réalisés par des hommes et par des femmes se sont légèrement accentués (de 37,5% à 40%), avec un écart maximum en 2016 (c’est l’effet Valérian, le film de Luc Besson, avec un budget de près de 200 millions €).
  Les écarts de budget se retrouvent au niveau de la distribution dont le coût est inférieur de 35% pour un film de femme par rapport à un film d’homme, l’écart le plus marqué étant dans le matériel publicitaire.
  Les films de femmes sont projetés dans un nombre de salles plus faible que ceux des hommes (l’écart est de 32%).

Ce plus faible financement des films de femmes et de leur exposition a un effet sur le nombre d’entrées cumulé sur la décennie : 23,9% des films de femmes représentent seulement 12% des entrées. 1% des films de femmes seulement dépassent le million d’entrées, contre 8% des films d’hommes.

Concernant les femmes dans la production, elles représentent 45% des effectifs en 2019 (40% en 2010), mais la féminisation est plus marquée chez les technicien·nes non cadres et les effectifs restent très polarisés selon les métiers : d’un côté plus de 60% de femmes (par ordre décroissant) dans les métiers de scripte, costumière, coiffeuse, comptable, administratrice ; de l’autre plus de 60% d’hommes dans les métiers de machiniste, électricien, mixeur, preneur de son, cascadeur, constructeur de décor, réalisateur, régisseur, photographe, décorateur.
Seules les femmes scriptes (profession presque exclusivement féminine) ont un salaire supérieur à leurs homologues masculins ; mais les écarts de salaire les plus importants concernent la réalisation : les femmes gagnent 37% de moins que les hommes.

Le rapport fait un focus sur les actrices, pour constater qu’elles sont plus nombreuses que les hommes uniquement dans la tranche d’âge 25-29 ans. Au-delà de 40 ans, elles ne représentent plus qu’un tiers des effectifs. Encore plus inquiétant, leur nombre diminue fortement (-28%) entre 2009 et 2018 dans la tranche d’âge 40-49 ans. Et cette diminution s’accentue (-40%) dans la tranche suivante. A cette diminution des effectifs féminins, s’ajoute un écart de salaire entre acteurs et actrices qui dépasse 10% à partir de 50 ans.
Il existe donc bien un tunnel pour les actrices de plus de 40 ans au cinéma et ce phénomène s’est accentué dans la dernière décennies.

On voit qu’il n’y a aucune tendance « naturelle » à la parité femmes/hommes dans le milieu du cinéma. Cela justifie amplement la mise en place de mesures pour « l’encourager », comme la bonification de 15% du budget des films. Le Collectif 50/50 propose d’étendre ce dispositif à la production de court-métrage et à la production audiovisuelle. A suivre…

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