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Ziad Doueiri / Canal + / 2016

Baron noir


>> Geneviève Sellier / mercredi 14 décembre 2016

Baron noir est une série télévisée créée et écrite par Eric Benzekri et Jean-Baptiste Delafon, réalisée par Ziad Doueiri et diffusée sur Canal+ du 8 au 29 février 2016.



Comme le montrent les affiches, la série est construite sur un duo masculin de génération différente, un couple symbolique père/fils en rivalité pour la conquête du pouvoir : Francis Laugier devient président de la République (Niels Arestrup, né en 1949) et va tout faire pour empêcher Philippe Rickwaert de prendre le pouvoir dans le Parti socialiste (Kad Merad, né en 1964).

L’un de deux scénaristes, Eric Benzekri, est un ancien militant du PS et n’a pas caché que le modèle de Francis Laugier était François Mitterrand et celui de Philippe Rickwaert Julien Dray, dont on sait que la carrière politique a été quelque peu entravée par ses démêlés avec la justice pour divers délits de détournements de fonds (mais le scénariste a prudemment évacué dans la construction du personnage de fiction la dimension la plus discutable de son modèle : l’amour immodéré de Julien Dray pour les montres de collection… Il en fait au contraire un homme politique certes accroché au pouvoir, mais complètement désintéressé sur le plan personnel).

Le premier épisode met en scène, à la veille de l’élection présidentielle, le candidat du PS, Francis Laugier, dont l’homme de confiance est Philippe Rickwaert, député-maire de Dunkerke. Alors que le dernier débat donne l’avantage à la gauche, Philippe apprend par un policier de ses amis qu’il va y avoir une descente de police dans les bureaux de l’office HLM de Dunkerke pour constater des détournements de fonds au profit de la campagne du PS. Dans la nuit, il se débrouille pour détruire tous les documents compromettants et pour renflouer la caisse, mais pas assez, et il demande au trésorier de l’office de prendre sur lui le trou de 30.000 euros. Celui-ci se suicide, et le scandale prend de l’ampleur : Françis Laugier est incité par sa garde rapprochée parisienne (dont sa conseillère énarque Amélie) de se désolidariser de Philippe. Mais celui-ci parvient à retourner la situation en expliquant que l’argent a servi à aider des ouvriers en grève. Le juge est obligé de renoncer à poursuivre, et le candidat vient contraint et forcé exprimer lui aussi sa solidarité avec les ouvriers en grève en s’engageant à sauver l’usine. Mais c’est désormais la guerre entre les deux anciens amis. Philippe vote pour le président de droite. Et le président nouvellement élu va tout faire pour empêcher sa réélection comme député.

Cette vision de la politique comme une bataille entre mâles dominants a tout pour séduire le public de Canal+, adepte de blockbusters, de football et de porno. On est terrifié par ses mœurs carnassières mais on en jouit aussi bien sûr. Le rythme haletant des coups fourrés entre ces grands fauves, fait une grande partie du succès de la série, dont la 2e saison est en cours de tournage.

Philippe est un homme divorcé qui ne vit que pour la politique ; il a à peine le temps de baiser avec une jeune militante en adoration devant lui. Et son sexisme est montré comme un idiotisme de métier : il dit de la collaboratrice du président, sa rivale, un temps fonctionnaire européenne, qu’elle ferait mieux de « retourner sucer des queues à Bruxelles », en présence de sa fille adolescente qui réagit vivement.
Mais la rivalité politique entre les deux hommes se double d’une rivalité personnelle qui s’incarne dans une jeune femme aussi séduisante que dangereuse, d’abord bras droit du président, que le député du Nord parviendra à conquérir, y compris sexuellement.

En effet la jeune conseillère d’origine bourgeoise et aux dents longues, propulsée par le président comme première secrétaire du PS pour faire barrage à Philippe, finit par tomber dans les bras du député du Nord, de quinze ans son aîné, après qu’il l’ait aidée à « prendre » le parti, faute de pouvoir l’évincer.

Le choix de la belle Anna Mouglalis (née en 1978), pour incarner une version contemporaine de la Ségolène Royal des années 1980, reconduit les normes genrées en vigueur dans les fictions audiovisuelles : si le héros peut avoir le physique quelconque et l’âge mûr de Kad Merad, il n’en est pas question pour la protagoniste principale.


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